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plaisirs
de Pâques
Quand j’étais enfant, mes parents
réussissaient d’une manière ou l’autre à me
convaincre que j’avais vraiment vu le lapin
de Pâques. C’est, bien sûr, le pouvoir de la
suggestion. En pointant dans une direction
et en criant fébrilement « Tu le vois ? Tu le
vois ? », on finit bien par le voir, le lapin de
Pâques. Ou au moins sa queue touffue, qui
disparaît derrière un buisson.
Après Noël, Pâques est ma fête préférée. Fin mars,
début avril, le printemps bat son plein. Lors de mes
promenades quotidiennes avec le chien, je vois la
nature prendre vie. Les forêts et prairies maussades
et humides se transforment en une mélodieuse
symphonie bourdonnante où papillons et abeilles
trouvent leur place parmi des centaines de nuances de
vert, de jaune et de blanc. Partout, de jeunes pousses
apparaissent sur les arbres et les buissons. Je suis
submergée par les merveilleux parfums de fraîcheur
des jeunes plantes et des bourgeons qui s’épanouissent
tranquillement.
Et je ressens exactement la même chose lorsque
j’épluche la première asperge blanche de l’année.
Comment ne pas sourire devant tant de luxuriance ?
L’envie de ragoûts mijotés pendant des heures
s’estompe peu à peu. À moi les préparations rapides
avec un minimum d’ingrédients et un maximum de
saveurs. Rien que le fumet d’un délicieux plat est déjà
la moitié du plaisir de la table.
Après deux ans de galère avec le confinement et les
mesures, je me languis des moments où la porte est
grande ouverte et où
notre maison se remplit
d’amis et de famille
qui s’embrassent et
s’enlacent sans hésiter.
Plus de distances, mais
tous rassemblés autour
d’une table qui est peutêtre juste un peu trop
petite pour accueillir
tant de personnes à la
fois. Et pourtant, personne ne se plaint. Nous savons
maintenant ce que nous avons à perdre et combien il
est merveilleux de pouvoir célébrer les fêtes ensemble.
Plus besoin d’impressionner avec des pirouettes
gastronomiques sophistiquées. Croque-monsieur ou
simple salade, peu importe, ce qui compte, c’est de
partager des moments ensemble. Écouter ce que l’autre
veut dire. Se resservir un verre de vin. Être pris de fou
rire en faisant la vaisselle. Prendre une bouffée d’air
frais dans le jardin et s’extasier du parfum des premières
fleurs.
Et puis se retrouver à table et prendre le café. L’un a fait
un cake, l’autre a préparé une mousse au chocolat. Avec
des étoiles dans les yeux, nous nous régalons de toutes
ces bonnes choses. Un petit œuf de Pâques ? Bien sûr.
Cela ne se refuse pas.
Croque-monsieur ou simple salade,
peu importe, ce qui compte, c’est de
partager des moments ensemble.
Et puis, soudain, quelqu’un bondit jusqu’à la fenêtre.
« Vous l’avez vu ? » « Qui ? » « Le lapin de Pâques !
Là, on voit encore sa queue ! »
MARS - AVRIL - MAI 2022 I 71
